L’Autorité de la concurrence a publié un communiqué le 30 juillet 2021 relatif à la méthode de détermination des sanctions pécuniaires en matière de pratiques anticoncurrentielles qui abroge et remplace le communiqué précédent du 16 mai 2011.
S’appuyant sur la jurisprudence et la pratique décisionnelle des dix dernières années, cette nouvelle publication tire les conséquences de la transposition de la Directive ECN+ visant à accroître l’efficacité des règles de concurrence au sein de l’Union européenne.
Le contexte juridique
Ce communiqué tient compte des récentes évolutions législatives liées à la transposition en droit français de la directive (UE) 2019/1 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 visant à doter les autorités de concurrence des Etats membres des moyens de mettre en œuvre plus efficacement les règles de concurrence et à garantir le bon fonctionnement du marché intérieur (dit Directive ECN+).
Cette transposition a été réalisée par la loi n°2020-1508 du 3 décembre 2020 portant diverses propositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière économique et financière ainsi que par l’ordonnance n°2021-649 du 26 mai 2021 relative à la transposition de la Directive ECN+.
Ces nouveaux textes traduisent la volonté du législateur européen de renforcer l’harmonisation du droit de la concurrence au sein de l’Union et accroître l’efficacité de l’action des autorités nationales en la matière.
Dans ce cadre, assurer l’efficacité des sanctions est essentiel.
La directive ECN+, qui harmonise les critères de détermination du montant des sanctions, prévoit ainsi que les amendes doivent être « effectives, proportionnées et dissuasives ».
Les objectifs
Par ce communiqué, l’Autorité de la concurrence souhaite présenter, avec clarté et transparence, sa méthode de détermination des sanctions en matière de pratiques anticoncurrentielles. Elle réaffirme l’importance du caractère répressif et dissuasif des sanctions pécuniaires.
Les principaux apports de ce communiqué
L’article L464-2 du code de commerce indique en son cinquième alinéa que les sanctions pécuniaires sont appréciées selon les critères suivants : la gravité des faits – la durée des pratiques – l’existence d’une association d’entreprises – l’éventuelle réitération.
L’Autorité de la concurrence revient dans son communiqué sur chacun de ces critères.
- L’appréciation de la gravité et de la durée des pratiques anticoncurrentielles
Des précisions sont apportées quant à la méthode de calcul du montant de base de la sanction, qui repose en particulier sur la valeur des ventes. Plusieurs situations particulières sont envisagées, comme celles des marchés bifaces ou multifaces, que l’on retrouve souvent dans le cadre du secteur numérique.
La liste des éléments pris en compte pour apprécier la gravité des pratiques s’allonge et fait désormais référence à l’affectation de la diversité de l’offre, de la qualité, de l’innovation ou encore de l’environnement.
Les pratiques les plus graves d’ententes horizontales et d’abus de position dominante pourront voir le montant de la sanction majorée de 15% à 25% de la valeur des ventes.
L’Autorité de la Concurrence aligne ses critères d’appréciation de la durée des infractions sur ceux de la Commission européenne, et précise notamment que cette durée sera calculée au prorata temporis pour les infractions inférieures à une année.
- Les critères d’individualisation des sanctions
L’Autorité réitère l’importance dans sa méthode d’une appréciation au cas par cas des infractions et des sanctions dans le respect des principes de nécessité et de proportionnalité, excluant toute automaticité dans la détermination des sanctions.
Plusieurs circonstances atténuantes pourront ainsi être prises en compte, par exemple la cessation des pratiques dès l’intervention de l’Autorité ou encore une coopération effective.
A l’inverse, l’Autorité prévoit désormais que la sanction pourra être majorée si les gains illicites générés par la pratique anticoncurrentielle sont supérieurs au montant de la sanction pécuniaire de base.
- Le régime de sanction des associations d’entreprises
L’Autorité introduit de nouveaux critères de calcul et de nouveaux plafonds pour les sanctions applicables aux associations d’entreprises : une association d’entreprises pourra désormais être sanctionnée jusqu’à 10% de son chiffre d’affaires ou 10% de la somme du chiffre d’affaires mondial de chacun de ses membres actifs.
- L’appréciation de la réitération
Pour apprécier l’existence d’une réitération, l’Autorité de la concurrence prendra en compte les décisions françaises précédentes constatant une infraction, mais également toute décision prise au sein des autres Etats membres ou par la Commission européenne, ce qui constitue une illustration notable de la coopération européenne renforcée entre les autorités nationales impulsée par la Directive ECN+.
Le constat d’une réitération pourra donner lieu à une majoration de 15 à 50%.
L’intégralité du communiqué est disponible sur le site de l’autorité de la concurrence.
Pauline Kubat – avocate au Barreau de Lyon
Cet article a pour objet d’apporter une information générale sur le sujet abordé. Pour votre problématique spécifique, un conseil spécialisé est recommandé.
(Article initialement publié sur soulier-avocats.com)